9 октября 2015 г.

аудирование текст

                                                  Texte d’audition                                  10 класс
Les bons voisins
une perquisition          обыск
les radios étrangères    радиостанция « Свободная Франция »
un procès-verbal         протокол
Paris sous l’occupation allemande. L’action se passe pendant une perquisition, faite par la police.
   Ça, c’est passé comme au cinéma. Tout à coup huit hommes sont entrés dans notre petit appartement. Huit hommes à la fois, on manque un peu d’air. Et en été, pensez, donc. Nous allions nous mettre à table, on dîne tôt pour économiser l’électricité, et Pauline m’a crié de la cuisine de les mettre à la porte, que tout allait être froid. Ça les a fait bien rire. Pauline est arrivée avec la soupe, et c’est tout juste si elle ne l’a pas laissée tomber.
   Huit. Leur patron était gros. Il y avait un autre, très maigre avec des grandes mains qui s’avançaient vers tout comme pour tout prendre. Je m’expliquais avec le gros, je protestais, me rappelant qu’ils doivent présenter un papier, un ordre. Ça aussi, ça les a fait bien rire. Celui qui me perquisitionnait, me posait des questions sur le gouvernement.
   Moi, je ne pouvais pas lui répondre à cause des cris de Pauline qui se débattait avec un autre, lui arrachant notre photo en mariés. On voyait qu’ils en avaient l’expérience.
   Deux des inspecteurs s’étaient assis à table et mangeaient la soupe. Ils s’étaient versé du vin.
   Pauline avait voulu s’asseoir sur le pouf. Mais alors le maigre s’est jeté sur le pouf, l’avait retiré de sous elle.
-- Et bien, ça a assez duré, -- dit le gros. Où caches-tu le materiel, dis-nous vite où tu  caches le matériel.
-- Quel matériel ?
   Je jure que je n’avais aucune idée de quel matériel il voulait parler. Il sembla changer l’idée et me demanda :
-- Vous écoutez les radios étrangères ?
-- Moi, dis-je, mais je n’écoute même pas la Radio Nationale.
-- Ah ! Vous n’écoutez pas la Radio Nationale. Notez, que Monsieur a dit qu’il n’écoutait pas la Radio Nationale.
-- Mais ...
-- Il n’y a pas de mais. Et pourquoi n’écoutez-vous pas la radio Nationale et écoutez-vous les radios étrangères ? Vous les trouvez plus intéressantes ?
-- Avec quoi voulez-vous que j’écoute ?
-- Avec quoi ? Avec votre poste.
-- Mais je n’ai pas de poste.
-- Nous allons voir si vous n’avez pas de poste ... et comment, si vous n’avez pas de poste, écoutez-vous donc les radios étrangères ?
-- Mais je ne les écoute pas. Nous n’avons pas de poste. Regardez vous-même ...
   A ce moment deux hommes apparurent avec un paquet de beurre.
-- Vous voyez, patron, marché noir. Il y a près d’un kilo de beurre au marché noir.
   Et il écrivit un procès-verbal  qu’il me présenta à signer. Moi, je voulais lire avant de signer. Enfin, j’ai signé. Le gros pris le papier.
-- Qu’est-ce que c’est ? Comment avez-vous signé ?
-- De mon nom, dis-je. C’est mon nom.
-- Vous-vous nommez ...
Pétain. Robert Pétain. C’est mon nom. Oh, nous ne sommes pas parents.
-- Mais si vous vous appelez ... comme vous dites ... alors qui est-ce qui s’appelle Sellières, Simon Sellières ? Pas vous ? C’est combien ici ? Je veux dire, le numéro de la maison ?
-- Le dix-huit ...
-- Mais c’est au seize qu’il habite, ce Sellières.
   Pauline commença à crier :
-- Ah ! Vous ne savez pas compter jusqu’à dix-huit et vous venez déranger les gens chez eux !
   Enfin ils partirent. Je regardai l’heure. C’était vrai. Alors nous nous installâmes pour écouter. On entendait dans l’appartement de nos voisins, la voix qui disait :
« Aujourd’hui, 753-e jour de la lutte du peuple français pour sa libération ... »

D’après Louis Aragon